Tendances télé 2024 : selon Médiamétrie, 71 % des 15-34 ans ont privilégié le streaming en mars 2024, mais 58 % d’entre eux ont aussi regardé un programme en direct la même semaine. Ce grand écart statistique dit tout : la télévision vit une mutation historique, entre nostalgie du prime et frénésie de l’on-demand. Accrochez-vous, on rembobine… puis on appuie sur « play ».

Le direct est-il de retour pour de bon ?

Le succès du concert des Enfoirés 2024 (8,3 millions de téléspectateurs sur TF1) ou du Super Bowl diffusé simultanément sur M6 et DAZN rappelle une évidence : le direct reste le seul rendez-vous que le streaming ne peut pas totalement pirater.

  • 41 % des Français déclarent en 2024 « aimer regarder la télévision en live pour commenter sur les réseaux » (Ifop, avril 2024).
  • Twitch, avec ses 8,5 millions d’utilisateurs actifs mensuels en France, renforce ce phénomène de visionnage communautaire.

D’un côté, les plateformes misent désormais sur des soirées « Watch Party » (Prime Video pour Roland-Garros). De l’autre, les chaînes historiques revalorisent leurs plateaux « chauds » : « Quotidien » rallonge son temps d’antenne de dix minutes, France 2 ressort un « Taratata Live » trimestriel.
Le pari ? Transformer l’urgence du direct en avantage concurrentiel face au binge-watching. Mais si la promesse est forte, la logistique est lourde : plus cher, plus risqué, et soumis aux aléas techniques (coucou le blackout du lancement de « Mask Singer » en Belgique).

Femmes à l’écran : simple façade ou vraie révolution ?

Mars 2024 a vu la première grille prime-time 100 % réalisée par des femmes sur France Télévisions, du documentaire « Debout les cheffes » aux fictions « Astrid et Raphaëlle ». Symbolique ? Oui. Suffisant ? Pas encore.
En 2023, le CSA relevait seulement 39 % de personnages féminins dans les séries françaises, loin des 46 % chez nos voisins britanniques. Pourtant, quelques signaux forts se dégagent :

  • « Diane de Poitiers » (4,7 M sur France 2) portée par Isabelle Adjani, prouve qu’un biopic historique peut séduire grand public et critiques.
  • « Drag Race France » saison 3 (diffusion estivale annoncée) témoigne d’une représentation LGBTQIA+ affûtée, produite par EndemolShine.
  • Dans le talk-show, Monica Bellucci co-animera exceptionnellement « C à Vous » pour la fashion week – initiative inimaginable il y a cinq ans.

Pourquoi ce virage ? Le marché publicitaire réclame des récits plus inclusifs, et les plateformes internationales imposent des quotas. Reste qu’une héroïne forte ne suffit pas ; il faut aussi des cheffes auteurs, productrices, showrunneuses, afin d’éviter l’effet vitrine.

D’un côté… mais de l’autre…

D’un côté, Netflix finance la mini-série « Furies », signée par les scénaristes de « Lupin ». Six épisodes pilotés par une équipe majoritairement féminine.
Mais de l’autre, les talk-shows de deuxième partie de soirée restent à 80 % animés par des hommes (rapport INA 2024). La parité promet encore de belles batailles de chiffres.

Streaming contre chaînes traditionnelles : qui mène vraiment la danse ?

Les plateformes dominent-elles ? Oui, mais la course est plus serrée qu’on ne le croit. En janvier 2024, Netflix France compte 11,5 millions d’abonnés payants ; TF1, elle, affiche toujours 94 des 100 meilleures audiences de 2023. La télévision linéaire conserve le réflexe pavlovien du « 20 h », tandis que le streaming prospère sur la longue traîne.

Qu’est-ce que cela change ?

  1. La publicité adressée entre en scène : M6+ gratuit proposera, dès septembre 2024, des spots ciblés à la seconde près.
  2. Les catalogues deviennent transfrontaliers : « Plus belle la vie » est disponible sur Max en Amérique latine, créant de nouveaux revenus.
  3. La mesure d’audience évolue : Médiamétrie intègre depuis 2024 le visionnage hors-foyer et les partages de comptes, gommant l’avantage historique des plateformes.

Pourquoi la guerre du contenu s’intensifie-t-elle ?

Les coûts de production explosent : un épisode de « The Three Musketeers » (mini-série Disney+, tournage à Prague) dépasse 4 millions d’euros. Les diffuseurs mutualisent donc les risques : TF1 s’associe à Peacock pour « Ici tout commence » version US. En clair, chaque camp lorgne sur le terrain de l’autre, brouillant les lignes.

Comment repérer la prochaine pépite télé ?

Vous scrollez, vous zappez, vous hésitez ? Voici ma méthode de détection — testée, approuvée et légèrement obsessionnelle :

  • Surveillez les formats hybrides (fiction + plateau). Exemple : « Un, Dos, Très » revient en 2024 sous forme de série suivie d’un talk backstage.
  • Fiez-vous aux hastags émergents entre 21 h 10 et 22 h 00 : si #NomDuProgramme grimpe organiquement, il y a potentiellement un phénomène.
  • Ne négligez pas les chaînes payantes modestes : Polar+ a dégainé « Paris Police 1905 », reprise ensuite par BBC Two.
  • Analysez les saisons 2 : un renouvellement rapide est souvent gage d’audience solide (cf. « Tapie » confirmé par Netflix trois semaines après sa mise en ligne).

Qu’est-ce que le binge-watching, exactement ?

Le terme désigne le fait d’enchaîner au moins trois épisodes d’une série lors d’une même session. Selon l’Observatoire de la vidéo à la demande, 54 % des 18-24 ans pratiquent ce « visionnage glouton » chaque semaine. Cela influence la manière d’écrire : cliffhangers systématiques, arcs narratifs resserrés, et durées d’épisode plus flexibles (de 28 à 62 minutes pour « La Chronique des Bridgerton »).

Ma télé, votre télé, notre futur écran

Je l’avoue : je continue de tendre l’oreille au générique tonitruant de « Nulle Part Ailleurs », tout en lançant « The Bear » sur mon smartphone. Cette schizophrénie délicieuse résume 2024 : une télé caméléon, mi-nostalgique, mi-prospective. Restez dans les parages : entre notre dossier sur les talk-shows réinventés, l’interview d’un créateur de fictions courtes, et l’analyse des échecs du prime comique, la conversation ne fait que commencer.